Le formulisme

Dans l’histoire, l’effort humain a consisté à faciliter la vie. Le développement de l’artisanat et de l’agriculture a été une recherche continuelle pour diminuer la peine des hommes.

Le formulisme correspond à ce même phénomène au plan anthropologique : « Les gestes de l’homme, qu’ils soient conscients ou inconscients, tendent à se rejouer et vont d’eux-mêmes à une stéréotypie qui facilite l’expression et la mémorisation ». [op. cit. , p. 329. ] Ou encore comme le dit joliment un dicton : « La loi du moindre effort est une source de progrès. »

L’être humain ne peut pas inventer chaque matin. Il va retenir et transmettre les gestes et les formules les plus efficaces pour réaliser ses projets. Toute l’évolution de l’artisanat et des techniques en est l’illustration : art de tailler la pierre, faire du feu, construire…. . cette même loi régit encore les protocoles industriels ou médicaux.

De même, chaque culture a forgé un ensemble de formules orales : sentences de sagesse, contes, récits mythiques… Ainsi se constitue un patrimoine de savoir-faire et de formules qui permettent à l’homme de s’adapter à de nouvelles circonstances.

L’être humain va pouvoir faire jouer ces formules dans d’infinies combinaisons et, comme le maître de maison dont parle Jésus : « tirer de son trésor du neuf et de l’ancien » (Mt 13, 52). Ainsi, dans le domaine de la tradition orale, les formules peuvent s’enrichir de siècles et siècles dans la mesure où ceux qui en sont porteurs osent les faire jouer pour leurs contemporains. Par exemple, toutes les formules du « Notre Père » sont déjà présentes dans la Première Alliance et sa structure est celle de la prière juive : louange – demande – louange. Pourquoi est-elle devenue la prière des chrétiens ? Grâce à l’agencement nouveau que Jésus a fait de ces formules anciennes et qui correspondent à son propre parcours : sa venue de Dieu – son immersion dans l’épaisseur de la vie humaine – son retour dans la gloire du Père.

Dans les récitatifs, les formules apprises vont pouvoir jouer à l’intérieur de la personne qui a mémorisé. Elles vont lui permettre de combiner des agencements nouveaux et de répondre à des situations nouvelles.